Plus d’emplois, certes, mais, proportionnellement, moins d’heures de travail

Les bonnes performances en matière d’emploi (domestique) en 2022, +105.000 suivant les projections de la BNB de décembre 2022, ont suscité beaucoup d’intérêt politique et médiatique.
Cette estimation semble solide au vu des indicateurs dont on dispose à ce jour. Mais cette performance doit être relativisée :
- En termes relatifs, elle n’est pas aussi exceptionnelle que certains le pensent : depuis 1998, on a observé un taux de croissance – mesuré à 3 ans d’écart – plus élevé que celui observé en 2022 (+4%) à six reprises.
- Les heures de travail ont augmenté proportionnellement moins que l’emploi, en particulier pour les travailleurs indépendants.
- Les heures de travail effectivement prestées ont – en moyenne – diminué.
Résultat de ces diverses évolutions : le nombre moyen d’heures travaillées est en 2022 à son plus bas depuis 1995, si on ne tient pas compte bien sûr des années 2020 et 2021, tant pour les salariés que pour les indépendants.
Certes, on peut penser que les conséquences des crises ne sont pas encore totalement effacées et qu’il n’est donc pas impossible que le nombre d’heures de travail puisse, en 2023, revenir à des niveaux proches de ceux observés avant les crises récentes.
Pour ce qui est des salariés on notera en particulier que
- le chômage temporaire est toujours, fin 2022, a un niveau supérieur à celui observé en 2019 ; ce chômage temporaire explique en grande partie l’écart entre l’évolution en 2022, par rapport à 2019 (dernière année « normale »), de l’emploi salarié et celle des heures de travail salariées relativement aux tendances de moyen terme ; la situation devrait progressivement revenir « à la normale » ;
- par contre, on peut penser que la croissance structurelle du pourcentage de salariés en incapacité primaire ou en invalidité s’est poursuivie depuis 2019, voire intensifiée, même déduction faite des travailleurs malades pour cause de Covid, ce qui, toutes autres choses égales par ailleurs, réduit le nombre moyen d’heures rémunérées ;
- enfin, le nombre d’heures salariées utilisé dans cette note concerne les heures de travail effectives, à savoir : les heures payées moins les heures non prestées (pour raisons de congés ou de maladie) ; or diverses sources privées indiquent que le nombre de jours pour maladie de courte durée (dont la rémunération est assurée par l’employeur) est lui aussi orienté à la hausse ; si cette hausse est correctement intégrée dans les calculs des comptables nationaux, cela devrait pousser, toutes choses égales par ailleurs, le temps de travail moyen un peu à la baisse.
Au total, on peut penser que le nombre d’heures de travail moyen des salariés devrait revenir en 2023 à un niveau proche – même si probablement légèrement inférieur – de celui d’avant les crises récentes.
Source: Philippe Defeyt